Regio-Interview

22 janvier 2019

Regio-Interview – Entretien avec les acteurs de l’économie, de la science et de la politique

Dix questions posées à Jacques Gerber, Président du Gouvernement jurassien en 2019, Ministre de l'économie et de la santé 

Tout d'abord, quels sont les objectifs du Gouvernement jurassien dans le domaine des relations extérieures ? 

Il est utile de rappeler que la Constitution jurassienne consacre un article aux relations extérieures, appelant à la coopération avec les autres cantons et les régions voisines ainsi qu’à l’ouverture au monde et à la collaboration avec les peuples soucieux de solidarité. Dans ce contexte, l’objectif premier des relations extérieures jurassiennes est donc de se conformer à la Constitution.

D’une manière plus générale, la politique jurassienne de relations extérieures vise à favoriser le développement économique, social, environnemental et culturel du Jura :

  • en renforçant le rôle et l’importance de celui-ci face à l’extérieur ;
  • en développant des relations toujours plus approfondies avec les territoires voisins (Rhin supérieur, agglomération bâloise, aire urbaine Belfort-Montbéliard, Arc jurassien, espace BEJUNE) ;
  • en initiant la mise en œuvre de projets de partenariat structurants.

Si vous mentionnez la coopération transfrontalière : quelles sont les opportunités qui s'offrent au canton de Jura ?

De par sa taille et sa position géographique, le Jura doit penser son avenir en relation avec ses voisins, de Suisse comme de France ou d’Allemagne. Toutes les activités de l’Etat comportent aujourd’hui une dimension extérieure. En développant des partenariats constructifs, le Jura a renforcé son attractivité dans des domaines aussi divers que les transports, la formation, la culture et le développement économique. Le Gouvernement jurassien souhaite poursuivre son action et mettre en œuvre des politiques d’ouverture, qui participent du développement cantonal de même qu’elles contribuent à forger une image positive du Jura.

Quels sont les enjeux économiques majeurs à venir pour le Jura et quels sont les facteurs les plus importants qui peuvent inciter une entreprise à s’installer dans le canton ?

L’implantation réussie de l’antenne jurassienne de Switzerland Innovation Park Basel Area est le principal enjeu qui nous attend durant les prochains mois. Par ailleurs, le Gouvernement a mis en consultation sa stratégie de mise en œuvre du projet fiscal 2017. Un autre enjeu majeur qui nous attend en 2019 ! Les mesures proposées sont importantes : elles renforcent l’attractivité du Jura et sont dans la ligne de nos collaborations fructueuses avec Bâle-Campagne et Bâle-Ville.

Pour répondre à votre deuxième question, le Jura est l’un des leaders mondiaux de la précision et de l’excellence. Il est reconnu pour son savoir-faire loin à la ronde. L’entreprise qui souhaite s’implanter dans le Jura aura un accès à toutes ces compétences qu’elle trouvera dans un cadre naturel encore préservé. Bien des campus de par le monde cherchent à reconstituer un tel environnement, mais de manière artificielle ! Dans le Jura, c’est une réalité de tous les jours. 

Nous, Jurassiens, apprécions les contacts directs. Ainsi, la porte de mes services et la mienne sont toujours ouvertes pour trouver rapidement des solutions concrètes. Y compris avec les autres départements ! La petite taille de notre canton et de notre administration est ici une force qui nous permet de réagir très vite, sans lourdeur bureaucratique.

Le Jura a encore l’avantage de disposer de zones d’activités en suffisance, à coûts avantageux. Toutes sont situées à proximité de lignes ferroviaires et d‘échangeurs autoroutiers. Elles sont donc directement connectées aux réseaux nationaux et internationaux. Sur certaines zones d’activités, l’administration est même en mesure de délivrer un permis de construire en 14 jours !

Le canton peut aussi offrir des aménagements fiscaux ou le statut de « Nouvelle entreprise innovante ». Un statut unique en Suisse pour de jeunes entrepreneurs et les investisseurs jurassiens qui les soutiennent. Et puis, nous disposons d’aides financières pour appuyer les projets d’innovation des entreprises.

Pourquoi l'orientation vers Bâle a-t-elle gagné en importance ces dernières années pour le canton du Jura ?

Quoique romand, il est indéniable que le canton du Jura fait partie de la métropole bâloise : le Jura est membre de la Conférence des gouvernements de la Suisse du Nord-Ouest et de la Conférence métropolitaine de Bâle, il participe avec les deux cantons bâlois au Parc suisse de l'innovation, il propose une maturité intercantonale bilingue avec le canton de Bâle-Campagne, les membres des exécutifs cantonaux se rencontrent régulièrement. Il faut également mentionner l’étroite collaboration entre l’Hôpital du Jura et l’Hôpital universitaire de Bâle dont l’objectif est de renforcer l’offre de soins.

Cela étant, sans en négliger les apports, le Gouvernement jurassien constate que ces relations demeurent principalement à un niveau institutionnel. Il estime ainsi nécessaire de les étendre car le rapprochement vers Bâle lui offre notamment des possibilités de développement économique et démographique, des perspectives professionnelles pour sa population et de nouvelles opportunités de collaboration dans des domaines tels que la santé et la formation. L’inscription de la route H18 Delémont-Bâle au réseau des routes nationales offre de plus, à moyen terme, la perspective d’un développement important de cet axe de communication. 

Quelle différence faites-vous entre la coopération transfrontalière trinationale (Suisse-France-Allemagne) et binationale (France-Suisse) ? 

Indéniablement, la coopération trinationale (Suisse-France-Allemagne) est plus exigeante que la coopération bilatérale, en ce sens qu’elle concerne deux langues et trois partenaires aux moyens, structures et modes de fonctionnement très différents. Elle nécessite une grande détermination de la part des politiques qui la conduisent. Dans ce contexte, l’expérience permanente menée dans le Rhin supérieur est tout à fait exemplaire et stimulante, vue du Jura.

Dans quelle mesure le programme Interreg et la Nouvelle politique régionale (NPR) participent à l’émergence de projets transfrontaliers qui font sens pour le territoire ? 

Les autorités jurassiennes ont la certitude que l’attractivité du Jura passe par la mise en œuvre de partenariats constructifs au-delà de ses frontières. Toutefois, pour qu’ils soient porteurs d’avenir, ces derniers doivent s’inscrire dans la durée. C’est en effet sur le long terme que les politiques extérieures prennent véritablement leur sens. Or, cette dimension temporelle a un coût que les programmes Interreg permettent, en partie, d’absorber. A ce titre, Interreg fonctionne comme un catalyseur bienvenu.

Quels sont vos conseils pour réussir un projet de partenariat transfrontalier ?

Les modalités de mise en œuvre et de réussite de partenariats transfrontaliers sont nombreuses et diverses. Elles évoluent aussi dans le temps, en fonction d’un contexte politique plus ou moins europhile. Cela posé, s’il est une condition à mettre en exergue, c’est sans aucun doute la confiance réciproque. Deux partenaires se faisant confiance, tant sur leurs intentions que sur leurs capacités, sont beaucoup plus forts pour affronter les difficultés inhérentes à la réalisation de partenariats transfrontaliers.

La coopération transfrontalière peut-elle avoir un effet sur l'évolution des relations entre la Suisse et l'UE ? 

Oui, sans aucun doute. La coopération transfrontalière, c’est l’exercice au quotidien de l’Europe de la proximité. L’Europe ce n’est pas seulement la Commission et les institutions européennes, mais aussi des hommes et des femmes qui, chaque jour, passent la frontière et collaborent. Cela donne une vision différente et plus enthousiasmante du projet européen et ce n’est sans doute pas sans effet sur la perception que les gens ont de l’Europe. 

Quelles sont vos priorités pour votre année présidentielle 2019 ?

2019 marquera le 40ème anniversaire du canton du Jura. Ceci sera l’occasion de célébrer l’entrée du Jura dans la Confédération, de tirer un bilan de ces 40 premières années, mais surtout de réfléchir à la situation du canton d’aujourd’hui pour mieux anticiper et planifier celle de demain. Cela passe par une politique financière à même de soutenir le développement du canton. L’Etat jurassien doit questionner son organisation et son rôle. Je souhaite mener des réflexions, avec les membres de l’administration, du Gouvernement et du Parlement, mais également avec les représentants des partis politiques, afin d’initier des changements en profondeur. L’objectif de ce processus est de faire rayonner le Jura, améliorer le quotidien de sa population et in fine participer à la création d’un Jura qui donne envie à l’extérieur de ses frontières. 

Quels sont pour vous les trois mots qui résument le mieux les enjeux du canton liés à la coopération transfrontalière ? 

  • Opportunité
  • Confinance
  • Persévérance

Merci beaucoup pour l'interview !

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